Il y a environ 2 ans, j’ai fait une fausse couche. Voici mon histoire.

Ça commence avec une bonne nouvelle

Troisième mois d’essai, je suis tellement impatiente… J’achète les test de grossesse que l’on peut faire 1 semaine à l’avance, comme les fois précédentes, et là gros doute : il y a une barre mais tellement claire que je me dit que ça n’a pas fonctionné. 

Il s’avère que si bande il y a, aussi infime soit-elle, c’est qu’il y a une grossesse, mais que le taux est faible. On décide de ne pas en parler puisque ma sœur essaye en même temps, et que vu l’état dans lequel on se met ça ne sert à rien de la décevoir puisqu’elle ne l’est pas encore. On décide d’attendre pour l’annoncer alors que j’ai envie de le crier à la Terre entière. Je me suis sentie chanceuse, très chanceuse, mais je ne réalisais pas. 

Je passe dans les jours qui suivent un coup de téléphone à ma gynéco, pour une écho de datation. Les semaines passent, je ne suis pas malade, j’ai les seins très lourds et je suis fatiguée mais sinon tout va bien. Je me projette énormément, j’ai installé une application pour voir où en est le bébé. Je suis joie. 

Mais très vite, je sens que quelque chose ne va pas

Un dimanche matin (une semaine avant l’écho de datation, enceinte de presque 2 mois) je me lève tôt, j’ai un pressentiment. Je n’ai plus les seins lourds, je ne suis plus fatiguée. Je vais sur le canapé, je pleure, l’Homme me rejoint. Je lui dis que je veux aller à l’hôpital, que quelque chose ne va pas. Il me dit ok on part, lui aussi sent que ça ne va pas. 

On patiente dans la salle d’attente, on tente de rire, de penser à autre chose. On fait de l’humour noir, c’est notre façon de gérer la situation. On se dit que soit on voit notre bébé plus tôt que prévu, soit on nous dit que c’est fini. On a évidemment pensé à la fausse couche. 

On patiente beaucoup et puis on nous installe dans une salle, on me pose un tas de question dont le taux d’HCG. On m’explique qu’on va faire une écho et une prise de sang mais que ça pourrait être une grossesse extra utérine. Ça commence bien !

On me fait des examens

L’interne a l’air débordé, on entend des femmes en train d’accoucher hurler. Je m’installe pour l’écho (c’est toujours un réel plaisir d’écarter les cuisses devant un mec qu’on ne connaît ni d’Eve ni d’Adam et qui t’insère une sonde en face de ton homme). L’Homme reste sur le côté, ça commence, il cherche de partout mais ne trouve rien. J’ai peur. Je commence à croire que j’ai fait une grossesse nerveuse. Il cherche également dans les trompes pour détecter une éventuelle grossesse extra utérine et m’explique que si c’est le cas c’est une grossesse qu’il faut stopper. Mon monde s’écroule. 

Il veut me faire une prise de sang pour contrôler le taux d’HCG. Il part, mais mon homme qui était venu me soutenir s’écroule devant moi, toujours les jambes écartées (cette fois avec un draps pour ne pas exposer mon monde à tous justement). J’essaye de le retenir et crie à l’aide à l’interne ! On l’allonge les jambes en l’air, je suis inquiète mais je pense que l’émotion et le manque de petit déjeuner auront eu raison de lui !

L’interne fait des va-et-vient puis essaye de me piquer au moins à trois endroits différents sans succès. Il me fait mal, il gratte dans mon bras avec sa seringue. L’Homme est venu me soutenir, je déteste les prises de sang et les aiguilles en général. J’arrive encore à faire de l’humour en disant à l’interne que c’est un dimanche pourri pour lui : il n’arrive pas à me piquer et il doit m’annoncer que je fais une fausse couche ! Il appelle une collègue, ça prendra un temps qui me semble infini. La sage-femme râle me pique et repart. Super ambiance non ? 

On attend beaucoup… pour une mauvaise nouvelle

Au bout d’une heure, l’interne revient pour nous dire de patienter encore une heure. On est seuls avec notre angoisse et nos interrogations. Je dis à l’Homme de rentrer manger un morceau, je le tiens au courant. L’attente est interminable. L’interne revient avec les résultats : le taux a augmenté mais très faiblement, c’est mauvais signe. Je ne sais pas à quoi m’en tenir. Il m’explique qu’il faut attendre le médecin. 

L’Homme revient puis le médecin arrive au bout d’une éternité. Elle me refait une écho et là un ascenseur émotionnel comme jamais ! Il y a une poche… hourra, l’interne est nul ! Elle est vide… Je tremble à cause de l’adrénaline, elle me demande si j’ai froid. Elle m’a à peine adressé un regard depuis le début. « C’est un œuf clair, ça va s’évacuer seul. » 

Mais je ne comprends plus rien

L’Homme vient me prendre la main, je pleure. Il faut revenir dans 3 jours pour vérifier que c’est bien un œuf clair. Ce n’est donc pas sûr ? Je ne comprends rien, je suis anéantie. On prend rdv pour la semaine d’après, il me donne un médicament pour la douleur, on part, je m’effondre dans les bras de l’homme dans le couloir. Je demande à aller voir mes parents. J’en ai besoin.

Tellement d’émotions me traversent, je suis triste, je me sens vide, et à la fois j’ai cette poche vide en moi et souhaite par-dessus tout qu’elle s’en aille. Je suis en colère. J’ai besoin de ma mère.

J’ai besoin de réconfort

On arrive, mes parents ouvrent la porte. Ma mère sent que ça ne va pas et me prend dans ces bras, je me lâche. On dira des banalités, des choses comme « il vaut mieux que ça arrive maintenant ». Que dire finalement ?… Je me raccroche pourtant à la prochaine écho car on ne sait jamais, un miracle, peut-être que l’embryon n’était pas encore développé…

Je saigne déjà, c’est la fin.

Un sms à ma chef pour expliquer la situation, je n’aurai pas la force de le dire aux collègues. Je lui demande de les prévenir. Un lundi compliqué, des heures à chercher des témoignages, des espoirs… 

Encore des examens

Puis écho avec une gynéco parfaite. Empathique, gentille.

L’écho faite, elle ne me dit toujours pas clairement que la grossesse est arrêtée, je le vis très mal, je suis en colère. Elle m’explique qu’elle ne peut pas me le dire tant que la poche n’est pas partie et que le taux n’est pas a 0. J’essaye de lui faire dire d’une autre manière, en lui demandant si je peux manger du foie gras à l’anniversaire de mon père mais elle me rétorque qu’elle ne peut pas me dire oui pour le moment.

Et c’est la fin

Dans la nuit j’ai mal, je prends leur médicament et le matin je me réveille dans le mal, j’ai mes règles, la poche s’évacue donc naturellement mais je suis tellement mal que je reprends un médicament. L’homme est déjà parti bosser et moi je frissonne, je ne peux pas marcher, j’ai peur, je me sens très mal et j’appelle l’hôpital qui me dit que tout est normal. Je saurais que c’est finalement les effets secondaires du médicament, je ne l’ai pas toléré. La gynéco me dira par la suite qu’elle ne donne pas ce médicament car peu de gens le tolèrent. Merci alors, c’était un super moment !

Un dernier rdv avec la gynéco pour vérifier que tout est parti… Ça y est c’est vraiment la fin.

Bilan

J’ai été triste, j’y repense parfois, je l’ai digéré. C’est effectivement la vie, le corps est bien fait. Sauf que ça, je ne veux l’entendre que de moi. Je n’ai pas envie que des inconnus ou même des professionnels comme mon médecin me racontent des conneries. J’ai eu droit à tout un couplet sur les couples qui sont anéantis après une fausse couche et que c’est n’importe quoi.

Peu importe le nombre de semaines pendant lesquelles la femme était enceinte en fait. Prenons en considération le passé, le présent des gens, respectons leurs émotions. Ce n’est pas parce je n’ai pas « mal vécu » ma fausse couche que je vais cracher sur les personnes qui en font une dépression, bien au contraire. On ne connait pas la vie des gens, et quand bien même. Tout le monde a le droit d’avoir son avis, mais un peu d’empathie dans ce monde, c’est visiblement trop demander.

Avec l’Homme on en a parlé naturellement à notre entourage, car le tabou sur cet événement, qui concerne 1 femme sur 4, ne devrait pas l’être. En en parlant, des personnes se sont confiées, certaines m’ont dit merci pour l’info. Car même si je savais ça possible, je ne pensais pas que c’était aussi fréquent.

Si cela vous arrive sachez que vous n’êtes pas seule ou seuls, que vos émotions sont légitimes, peu importe le nombre de semaines de grossesse. Parlez-en si vous en ressentez le besoin, cajolez-vous, faites vous aider si vous ne passez pas le cap.

Si cela arrive à un proche ne minimisez pas, et soyez juste présent. Oubliez les phrases bateaux, ça n’aide pas franchement 😉

Je suis retombée enceinte quelques mois plus tard, quelques anecdotes sur ma grossesse 🙂